Martin : Jeune chercheur
J’ai fait un BAC S Sciences de l’ingénieur physique chimie. J’ai fait la Licence MIASHS et deux stages en laboratoire. J’ai choisi la spécialité TAL, beaucoup d’étudiants internationaux. J’ai été diplômé en 2016. J’ai pris rapidement un poste d’ingénieur d’étude à la MSH, à Nancy, en traitement de données. A sa suite, j’ai été pris en thèse à Montpellier, au INRAE et au CIRAD où je travaillais sur l’extraction automatique de connaissance dans les articles scientifiques. J’ai obtenu ma thèse et enchaîné un post doc. A la suite, j’ai rejoint l’équipe SIGMA au LIG de Grenoble, sur le projet NanoBubbles, pour 2 ans, où je suis aujourd’hui.
🎓 Quel est ton parcours ?
J’ai fait un BAC S Sciences de l’ingénieur physique chimie. J’étais à l’aise en électronique, en chimie. On nous a conseillé de choisir une école d’ingénieur, une classe prépa… Mais j’ai choisi psychologie car j’étais très intéressé par ce domaine. J’ai compris durant le 1er semestre que je ne voulais pas être psychologue, et j’ai découvert l’existence des sciences cognitives. Ça m’a beaucoup plu de combiner sciences dures et humaines, combiner des choses très diverses, complémentaires. J’ai fait donc L1 à L3 en Licence MIASHS. J’ai fait deux stages au laboratoire URAFPA équipe MRCA.
Dans les 2 stages que j’ai faits, j’ai travaillé sur l’expérience des rats plongeurs au laboratoire de l’ATILF. La première année surtout pour préparer les rats à l’événement Nancy renaissance en 2013, la 2ème année j’avais en plus un objectif d’étude concret et une mission de collecte et d’analyse de données. Les rats avaient été contaminés aux hydrocarbures, et on voulait voir comment cela allait altérer leurs comportements.
Je voulais continuer à étudier le comportement animal en master spécialisé mais il fallait impérativement avoir une licence en biologie. Je me suis dirigé en Master Sciences Cognitives initialement mon 2ème choix mais que je ne regrette pas du tout aujourd’hui.
J’ai choisi la spécialité TAL, aujourd’hui devenue Master TAL on était très peu en M1 et en M2 une quinzaine d’étudiants se sont ajoutés, des étudiants internationaux Erasmus mundus.
Durant ce Master, j’ai effectué un stage de première année qui avait pour but de créer des corpus pour étudier le vocabulaire utilisé dans des articles scientifiques. Ensuite, en deuxième année, j’ai travaillé sur le Réseau lexical du français (RLF) avec pour objectif de l’enrichir de définition provenant du Wiktionnaire. L’objectif était de trouver les points communs et résoudre les points de divergences entre les deux pour étendre le Réseau lexical du français. Les entrés du RLF sont originalement alimentées manuellement par des experts lexicographes, cette fusion et le travail l’accompagnant a donné une super base de travail pour augmenter la couverture de ce Réseau et faciliter leur travail par la suite.
J’ai été diplômé en 2016. J’ai ensuite candidaté à plusieurs thèses, dans un premier temps sans résultat. J’ai pris rapidement un poste d’ingénieur d’étude à la maison des sciences de l’homme (MSH, à Nancy), en traitement de données. J’assistais le travail des sociologues et historiens, eux-mêmes n’ayant pas trop de facilité avec les outils de traitement de données. Certains projets demandaient plusieurs semaines, d’autres plusieurs mois. Je changeais d’application, de sujets régulièrement. J’ai apprécié passer « de l’autre côté de la barrière » universitaire et d’aborder le monde de la recherche.
Ce fut une expérience décisive. A sa suite, j’ai été pris en thèse à Montpellier, grâce à cette expérience à la MSH. J’ai été accueilli au INRAE et au CIRAD où je travaillais sur l’extraction automatique de connaissance dans les articles scientifiques. J’avais acquis une 1ère expérience à ce sujet durant mes stages, et je m’intéressais également à la philosophie des sciences ce sujet était parfait pour moi.
J’ai obtenu ma thèse en décembre 2021. J’ai enchaîné un post doc de quelques mois dans le même laboratoire pour programmer un outil lié à mon sujet de doctorat. A la suite, j’ai rejoint l’équipe SIGMA au LIG de Grenoble, sur le projet NanoBubbles, pour 2 ans, où je suis aujourd’hui.
Je travaille toujours sur des documents scientifiques. J’étudie comment les connaissances se diffusent : entre scientifiques, de scientifiques à journalistes… Une part de cette approche consiste à traduire les affirmations que les auteurs font dans leurs publications.
Certaines sont incontestables, d’autres davantage liées à l’avis de l’auteur. Il faut les détecter, les classer, puis les traquer d’articles en articles grâce aux citations entre articles. Je travaille à détecter ce qu’en disent les autres chercheurs, s’ils reprennent les affirmations du chercheur cité, comment ils se positionnent vis-à-vis de ces affirmations etc. Dans le cadre de mon travail je côtoie notamment des nanobiologistes, des spécialistes de la sociologie de la recherche, des historiens et philosophes des sciences.
Le champ sur lequel je travaille est récent donc, d’une part les connaissances ne sont pas encore solides dans le domaine, et d’autre part l’industrie se développe rapidement dans ce domaine. Mon travail servira donc à la fois dans le milieu scientifique universitaire, dans le monde de la recherche, et pour des acteurs de l’industrie, pour ceux du journalisme …
💼 Quel est ton poste aujourd’hui ?
Je réalise un post-doctorat, j’ai donc le grade de jeune chercheur. Mon contrat actuel court sur 2 ans, jusqu’en avril 2024.
🏢 Quelques mots sur ta structure (entreprise/institution/laboratoire/association) actuelle ?
Le Laboratoire d’Informatique de Grenoble (LIG) est un grand laboratoire regroupant 22 équipes et près de 450 acteurs scientifiques. Ils œuvrent sur une grande diversité de pans informatiques : les aspects fondamentaux (modèles, langages, méthodes, algorithmes) et les synergies entre les défis conceptuels, technologiques et sociétaux.
📋 Raconte nous : quelles sont tes missions, à quoi ressemblent tes journées ?
Mon travail de recherche comprend divers aspects.
D’une part j’étudie toujours ce que d’autres ont déjà fait, je réalise un état de l’art. Ensuite en fonction de ces bases, je développe des stratégies pour répondre à ma question initiale, je vais alors : développer des algorithmes, faire de l’apprentissage machine pour détecter les affirmations faites par les auteurs dans les articles scientifiques, tester mes résultats, améliorer mon approche, diversifier… J’annote manuellement les affirmations, puis je fais passer mon programme dessus pour savoir si mon programme trouve la même chose. Dans cette mission je constitue également un corpus d’article scientifiques sur lesquels d’autres travaux pourront ensuite capitaliser.
Il y a également une part de transmission à la génération suivante. Je participe à l’encadrement des stagiaires de l’équipe, rédige des sujets de stage, je donne des cours à l’université.
🔧 Quelles compétences techniques mets-tu à profit ?
L’anglais est bien sûr indispensable pour la recherche, notamment pour lire l’immense majorité des articles et dialoguer avec les collègues. Il est nécessaire de savoir se maintenir à jour en matière de connaissances scientifiques, de pouvoir réaliser des états de l’art cohérents et productifs. Je dois savoir sélectionner les articles de bonne qualité, ceux qui traitent vraiment de notre problème ou d’une problématique qui peut nous aider à répondre à la nôtre.
D’un point de vue informatique pur j’utilise de la programmation, majoritairement en Python, et environ 20% de web (pour développer des interfaces, ce qui est utile dès que je souhaite partager mon approche, recueillir un avis ou réaliser un test avec des collaborateurs).
Enfin pour le traitement des données c’est intéressant d’être à l’aise en mathématiques, de savoir faire parler les données.
💫 Et côté qualité qualités, lesquelles sont un atout dans ce domaine ?
Tout d’abord il faut être curieux. Mon objectif c’est de trouver des choses qui n’ont pas été trouvées avant.
Il faut être multi-tâche : une fois docteur on a des cours à donner, on participe à l’encadrement des stagiaires, différents problèmes de recherche imbriqués sur lesquels on travaille…
On peut aussi travailler sur un sujet parallèle pour parfois se redonner de la motivation, de la curiosité, ou des idées pour le 1er. Par exemple s’intéresser aux données recueillies lors du grand débat national. Le prestataire n’ayant pas partagé en open source leur méthode d’analyse, des collègues et moi-même avons essayé par diverses méthodes de retrouver leurs résultats. C’est intéressant aussi d’interpréter les résultats, de faire parler les données d’une autre façon. On peut par exemple conclure de ces données que là où les gens demandent le plus de pistes cyclables, ce n’est pas en centre-ville, ce n’est pas en campagne, c’est en bordure d’agglomération.
🥰 Qu’est-ce qui te plait dans ton métier, pourquoi le recommanderais-tu à un étudiant ?
J’apprécie la liberté de la recherche. Il n’y a pas de manuel à suivre tous les jours. Il y a un objectif, je le résous comme je veux, avec une grande flexibilité dans mon approche. Un chercheur est embauché pour son expérience, pour répondre à la problématique, et pour son intérêt pour la problématique, comment il saura se l’approprier pas parce qu’immédiatement il a la solution.
J’apprécie de ne pas travailler uniquement avec des gens qui sont en informatique. C’est nécessaire pour que je reste intéressé par mon travail. J’apprends et découvre des choses tous les jours, en faisant avancer d’abord mes propres connaissances et compétences.
👾Dis-moi ton métier sans me dire son nom ?
Je passe au crible les articles scientifiques et j’apprends aux machines à faire de même.
📚 Quelles compétences as-tu acquises à l’IDMC ?
J’utilise la programmation, les théories du langage et linguistiques, la logique formelle.
Ces études m’ont apporté une ouverture pluridisciplinaire, savoir intégrer à mes approches, mes connaissances, des visions et des travaux pour faire ses recherches au mieux.
📜 Que dirais-tu de la formation à un futur étudiant, qu’en retiens-tu ?
Le fait d’avoir des connaissances qui viennent de beaucoup de domaines différents, d’être capables de fusionner des connaissances diverses, venant de domaines différents sont très utiles dans mon travail et en général dans la recherche.
C’est un plus de d’être capable de reconnaître que les recherches en sciences humaines dont en philosophie peuvent apporter et s’appliquer à l’informatique.
Si l’étudiant est intéressé par au moins 2 domaines étudiés en Master il va s’y amuser. J’ai envie d’encourager n’importe qui à aller là-dedans car c’est enrichissant pour tous. La pluridisciplinarité est vraiment un plus.
🏛️ Que dirais-tu de l’Institut ?
Les enseignants chercheurs et intervenants sont abordables, j’ai de très bons souvenirs avec beaucoup de profs. Ils sont présents, disponibles pour aider les étudiants. Ils n’ont pas de problème à être ouvert à d’autres disciplines. Les personnes avec qui j’ai travaillé étaient très intéressantes, au sein des projets tutorés par exemple. C’est un plus d’avoir un cursus dispensé en grande partie par des enseignants chercheurs.